Alexandra : cultiver la terre pour se reconstruire
Elise Cabane
5/8/20242 min read


L'interview complète d'Alexandra sera prochainement disponible sur Youtube...
Dans les Pyrénées-Orientales, département où le taux de chômage atteignait 12,4 % en 2023, soit le plus élevé de France métropolitaine, le chantier d’insertion L’École de la Terre propose des contrats temporaires aux personnes éloignées de l’emploi. Parmi elles, Alexandra, immigrée roumaine, y développe des compétences professionnelles tout en surmontant les obstacles qui freinent son retour à l’emploi.
Le pantalon couvert de terre, Alexandra est en pleine opération de débroussaillage quand nous la rencontrons. C’est ici, sur le chantier d'insertion de l'Ecole de la Terre à Bompas, que cette femme de 33 ans, originaire des Carpates roumaines, tente de reprendre son destin en main.
Elle raconte son parcours d’immigration. Un parmi tant d’autres mais qui incarne une cause plus large : l’émancipation d’une mère immigrée, par le travail. Née en Roumanie, Alexandra arrête ses études au lycée et travaille dès ses 16 ans dans une usine textile. En 2015, elle a 23 ans quand elle rejoint en France un homme rencontré sur Facebook : le père de ses futurs enfants.
Un récit d'émancipation par le travail
Très vite, ses rêves s’effacent derrière la réalité d’un foyer où elle se retrouve enfermée. Mère de quatre enfants, dont deux décèdent en bas âge, elle s'isole. « Je ne sortais pas, je n’avais envie de rien », confie-t-elle. Quand elle quitte son mari, elle se retrouve au RSA et perd la garde de ses enfants. Son combat désormais : les récupérer. Elle enchaîne les petits boulots dans les fermes et les usines du département. En 2018, elle découvre les chantiers d’insertion à Olette. Elle y fabrique du mobilier en matériaux recyclés. Puis fin 2024, elle rejoint le chantier de l’École de la Terre. Ici, elle apprend à cultiver la terre et son français s'améliore de jour en jour.
Surtout, elle retrouve confiance en elle. « Mes collègues viennent d’horizons différents, j’apprends beaucoup d’eux et les chefs nous valorisent », explique la jeune femme. Elle bénéficie aussi d’un suivi avec une assistante sociale et une conseillère en insertion. Son avenir, Alexandra le voit en France. Elle plaisante : « en Roumanie, il y a trop de neige, ici, il y a du soleil, on peut bronzer.» Mais son combat n'est pas terminé. Ses enfants restent sa priorité. « Je vais gagner leur garde, je suis forte », martèle-t-elle.
Refuser la fatalité
Côté professionnel, elle rêve de conduire des tracteurs et d’obtenir son certificat de débroussailleuse. « J’aime tout, tant qu’il y a de l’argent. La vie est dure, il faut savoir tout faire. » Alors que les financements pour les dispositifs d’insertion se fragilisent, Alexandra est une preuve de leur nécessité pour les personnes les plus éloignées de l’emploi. Elle incarne ces femmes immigrées qui refusent la fatalité. Avant de se quitter, elle adresse un dernier message à son ancien mari : « Tu as tout fait pour me briser, me mettre sous silence. Regarde maintenant, je travaille, je me bats, je reconstruis ma vie. Et toi, tu fais quoi ? »
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